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Samedi 31 décembre 2022, à 19h44
Voilà, nous sommes le 31 décembre et ce dernier jour de 2022 vient clôturer une année difficile sur plein de plans, sans laisser présager de meilleures dispositions pour le début de 2023.

Au moment où les gens se préparent à fêter le réveillon, je suis sous ma couette et je choisis de passer la soirée avec moi-même ici, devant mon clavier. Mon tricot n'est pas très loin, et j'ai comme compagnon de réveillon Eko que je caresse d'une main tout en étant sur le PC.

L'année 2022 se termine et quelle année... J'ai envie de profiter de cette soirée pour faire le tri dans mes pensées et essayer au mieux de démêler les fils de ma vie. Je suis complètement perdue par rapport à ce que je veux faire dans les prochains mois. J'ai l'impression que l'univers m'envoie des signaux énormes pour me dire de faire demi-tour et de changer de voie, mais je ne sais pas si je dois les écouter ou persévérer. J'avais pourtant "tout" pour être heureuse : à force de courage et de persévérance, j'ai construit ma vie de rêve. Une maison à la montagne, avec un jardin, une baie vitrée qui donne sur une vue magnifique, des copains-copropriétaires, l'amour de V. et Eko, une paire de skis de rando dans le garage, de nouvelles amitiés annéciennes et un boulot qui a du sens.

Face A : le rêve.

Face B : la réalité. La maison est loin de la ville, je me sens seule dans mon paradis doré, j'en ai marre de passer mes journées devant un PC en télétravail, je m'embourbe dans les travaux, les copropriétaires ne sont plus vraiment des copains, V. a quitté la maison avec Eko et on parle de se séparer pour de bon ce qui me provoque des crises d'angoisse.



Comment savoir s'il serait plus raisonnable d'arrêter de s'entêter et de tout abandonner, ou de persévérer ?

Prenons le temps d'envisager les différentes options (oui, je ne suis pas consultante pour rien et je me parle à moi-même, mais de toutes façons je sais que je suis quasi-seule sur cette page alors autant profiter de l'occasion pour poser les choses et que ça me soit utile).


PLAN A : Imaginons que je m'entête et que je continue à essayer de vivre ma vie actuelle dans la maison, en télétravail, avec les voisins et peut-être sans V. et Eko. J'ai déjà fait le plus dur en décidant de quitter le confort de ma vie parisienne il y a trois ans. Je suis maintenant en Haute Savoie, j'ai commencé à me faire quelques amis, et il faut que je continue à étendre mes racines : organiser des randonnées avec le groupe d'internationaux, m'inscrire au Club Alpin, peut-être à un cours de danse, contribuer à une asso, aller plus souvent à des événements à l'E. pour rencontrer des nouvelles personnes qui partagent mes valeurs. Me forcer à sortir souvent et à sortir de ma zone de confort. Je passerai toujours la plupart de mes journées devant un écran, mais j'aurai une vie sociale plus active le soir et le weekend.
Niveau d'envie par rapport à ce plan ? 5-6/10
Pour faire augmenter ce chiffre, il faut que j'imagine me construire une "famille". J'ai besoin d'avoir des gens autour de moi sur qui je peux compter. A Paris, ma famille est constituée de quelques amis proches avec qui je me sens totalement en confiance, de mon frère, et même récemment de ma cousine. Je sais que si j'ai besoin d'aide ou juste de passer des bons moments, ils seront là pour moi : certains me feront parler, d'autres me changeront les idées, mais dans tous les cas je me sentirai en sécurité. Ma famille parisienne inclut aussi mon entreprise et mes collègues : c'est bête mais ils m'apportent une grande stabilité, un peu comme si les locaux étaient une grande maison dans laquelle je peux retrouver plein de têtes familières à n'importe quel moment.
A Annecy, si V. et Eko ne sont plus là, il faut que je me constitue une autre famille : une nouvelle relation amoureuse ? (mais je n'aime pas l'idée de "chercher quelqu'un" dans cette optique) de bons amis ? (mais ça ne se contrôle pas) une entreprise ici ?
Voyons les autres plans possibles...


PLAN B : Je cherche donc un travail ici, pour me recréer un sentiment d'appartenance au quotidien. Je quitte la sécurité de ma famille professionnelle parisienne pour me lancer dans une nouvelle aventure ici.
Rien que d'écrire cette phrase, je frémis de peur. Je n'ai pas du tout envie de perdre le peu d'attaches que j'ai en ce moment, même si c'est dans une optique positive. Le plan B n'est envisageable qu'après le plan A, une fois que je me serai recréé une vie par ailleurs, et que je me sentirai suffisamment à l'aise et solide pour changer d'environnement professionnel.
Niveau d'envie par rapport à ce plan dans les conditions actuelles ? 1/10


PLAN C : Je revends la maison et je prends une location dans Annecy, pour retrouver plus de liberté et moins de contraintes. Je suis dans le centre-ville, je peux plus facilement me balader et rencontrer des gens. Je peux me déplacer à pied, tenter de nouvelles expériences : aller au théâtre ou au ciné, assister à des petits concerts dans des bars, aller à une soirée sans penser au long trajet en voiture.
Pour vendre la maison, il est nécessaire de terminer les travaux puisqu'elle n'est pas vendable en l'état. Il faut encore 3-4 mois minimum. Je perdrai de l'argent, probablement beaucoup d'argent : au moins plusieurs dizaines de milliers d'euros de frais de notaire. Je considérerai forcément ce projet comme un échec (même si les échecs ont parfois du bon et permettent d'apprendre de ses erreurs), j'aurai passé tellement de temps et d'énergie pendant deux ans pour au final tout perdre. Et je n'habiterai plus ici, dans ce paysage de rêve sous les étoiles.
Niveau d'envie par rapport à ce plan ? Je n'arrive pas à donner une note... Je n'ai pas envie de l'envisager pour le moment. Je ne suis pas allée jusqu'au bout de l'expérience. Peut-être que ce plan sera un back-up, le plan de secours si ça ne va pas mieux au printemps prochain et que je veux me sortir d'une situation qui empire.


PLAN D (je réfléchis aux plans au fur et à mesure, sans pré-méditation, voyons ce que ça donne) : Je finis les travaux de la maison et je la mets en location. Ca me permettrait de vivre ailleurs, par exemple en centre-ville, sans prendre de décision irréversible.
Niveau d'envie par rapport à ce plan ? Ca me tord un peu le ventre de d'envisager louer la maison, encore plus que l'idée de la revendre. Savoir que la maison pourrait être toujours là, mais que je ne pourrais plus y accéder...
Quelque chose ne me convient pas, sans que j'arrive réellement à mettre des mots dessus. Ca ne colle pas au projet : ce projet de maison était un projet de vie en communauté, pas un investissement immobilier, et pas une cohabitation entre étrangers. Si je loue la maison, c'est forcément de manière provisoire, pendant quelques mois, le temps de voir plus clair dans mes projets, et à quelqu'un de confiance.


PLAN E (eh bien, il y en a des plans et aucun ne me satisfait pour l'instant, à quel moment je m'inquiète ?) : Je coupe tout et je retourne à Paris. Tout couper, ça veut dire attendre que les travaux soient finis et revendre la maison. M'éloigner de V. et Eko et mettre notre histoire derrière nous, de manière définitive. Rembobiner la bande, considérer ces trois dernières années comme une parenthèse, une occasion d'avoir testé une nouvelle vie, de m'être enrichie de cette expérience mais de revenir là où j'en étais avant le covid, avant le burn-out, avant toutes ces dernières années hors du commun... Et revenir à quoi en fait ? Au trajet en métro tous les matins pour aller au bureau, au train-train rassurant des horaires de travail suffisamment prenants pour occuper les journées et ne pas trop se poser de questions. Revenir à la datcha. Retrouver les quelques amis qui sont encore à Paris et m'en faire de nouveaux. Voir ma petite nièce grandir en allant la voir quasi tous les weekends. Aller au théâtre. Au Monoprix pour les courses à 22 heures. Au bois de Boulogne pour prendre l'air. Prévoir des weekends à droite à gauche pour prendre l'air et re-goûter à la vie que j'ai eue ces dernières années : le grand air, les balades, la nature, le rythme plus lent de la province...
Niveau d'envie par rapport à ce plan ? Je n'ai pas envie de donner de note, j'ai des sentiments très conflictuels par rapport à ce plan. Une partie de moi me dit que c'est une vraie option, qu'au moins je serai en sécurité, et une autre partie a envie de pleurer. Cette deuxième partie est très triste à l'idée de revenir en arrière, elle a peur de retrouver le même train-train et d'avoir immédiatement envie d'autre chose. Elle a l'impression de devoir abandonner son rêve. La maison, la montagne, les randos les weekends, le lac en été, le chien, le grand air. "C'est pourtant ça qu'on voulait", elle chuchote, "pourquoi l'abandonner maintenant ?". Et l'autre partie répond "non non, à Paris on peut aller au théâtre, on peut voir des amis, on se sent plus en harmonie, c'est plus facile et plus rassurant". C'est sur. A Annecy, il y a encore tellement de repères à construire, tellement d'habitudes à recréer. Ca me fait penser au Plan A. Si j'arrive à recréer ici ce que j'ai sur la capitale, est-ce que ça pourrait fonctionner ? Est-ce que ça ne vaudrait pas le coup de s'en donner l'opportunité ?
Le Plan A vient de gagner des points à court-terme. Le E est un back-up mais je n'ai pas envie de l'envisager dans l'immédiat.


PLAN F (et je crois que c'est le dernier cette fois) : Je fais une énorme pause. Je demande une rupture conventionnelle au bureau ou je pose plusieurs mois sabbatiques, et je pars. Je ne me soucie pas de ce qui raisonnable ou non, je suis mon instinct, mes envies. Je pars voyager, loin ou pas. Je prends un avion pour la Thaïlande, ou alors le train pour l'Europe de l'Est (la Bulgarie, la Roumanie... ?), je vais voir une amie à Rennes, une autre à Nice, je fais plusieurs semaines de wooffing, j'envoie un mail pour demander à séjourner dans un éco-village, je fais des boulots manuels, je côtoie d'autres gens d'autres milieux, je découvre d'autres manières de vivre, j'écris des chroniques, je fais un stage de CNV, je me laisse guider par les gens avec qui j'ai un bon feeling et qui m'inspirent. Je tente de lancer une activité en lien avec la prévention du burn-out, j'essaye d'alerter le monde sur ce fléau qui engouffre tant de personnes. Je garde la maison pour l'instant, je me donne la possibilité d'y revenir entre deux séjours ailleurs, et tant pis si elle n'est pas louée, tant pis si j'y claque toutes mes réserves financières.
Je retrouve le sourire, je crois que c'est ça que j'ai envie d'écrire là tout de suite comme caractéristique la plus marquante de ce plan-ci : je retrouve le sourire, j'arrête de prendre le poids du monde sur mes épaules et j'essaye de profiter.
Niveau d'envie par rapport à ce plan ? J'ai des frissons plutôt positifs qui me parcourent le dos en me posant cette question. Je ne m'y attendais pas, ou pas autant. Pourtant j'ai appris à écouter le corps parler. Le corps pleurer intérieurement, ou le corps frissonner. Si on y fait attention, il y a ce mouvement de repli ou d'expansion qui ne trompe pas.
La partie raisonnable en moi résiste. Elle demande à avoir un plan financier, elle demande à être rassurée, ça lui parait impossible. Elle dit que ce n'est pas le moment, avec les travaux, les grosses dépenses, le prêt immobilier. Elle dit aussi qu'on n'est pas à l'abri que ça ne fonctionne pas, même au niveau relationnel et émotionnel, que je peux aussi me retrouver dans des situations difficiles, seule sans rien, et qu'elle ne veut pas prendre le risque. Elle aimerait avoir la possibilité de revenir en arrière, de reprendre le boulot si ça ne va pas. Elle préfère le congé sabbatique à la rupture, pour garder un filet de sécurité.



OK... pas d'autres plans en tête. Ca ne se voit peut-être pas comme ça, mais je viens de faire un sacré bout de chemin dans ma réflexion en écrivant ce texte. Si vous êtes un.e lecteur.rice extérieur.e, je m'excuse d'avance pour cette longue réflexion non-préparée. J'avais besoin de me parler à moi-même et il s'avère que vous étiez là.

Si je prends un peu de recul par rapport à ces plans possibles, j'en conclue donc que - sans prendre la moindre décision ce soir, ce n'est pas le but - je n'ai pas envie de revendre, louer la maison ou de retourner à Paris dans l'immédiat. J'ai envie de tenter d'abord autre chose : notamment de me construire des repères à Annecy et de voir si j'arrive à me recréer une "famille" avec qui je me sente en confiance. Il faut que je m'en donne les moyens, que sorte de ma zone de confort, sinon ça ne marchera pas.
Pendant les prochains mois, jusqu'à avril environ, je dois garder mon travail pour financer les travaux de la maison, qui sont indispensables dans tous les plans.
Si la situation évolue dans le mauvais sens et que je ne me sens pas à l'aise en Haute Savoie, j'ai toujours le back-up de retourner à Paris.
Et peut-être que dès maintenant, je peux planter une graine et laisser murir l'idée où je pourrais prendre plusieurs mois sabbatiques pour m'aérer et voir autre chose. Je ne sais pas encore sous quelle forme ça pourrait se concrétiser mais mon corps me dit clairement d'envisager cette direction.


Sur ce, ce texte n'était pas poétique mais nécessaire. Merci à moi-même de m'être prêtée à l'exercice (j'assume ma schizophrénie, je vous rassure). Merci à toi, future Flo, qui relira ce message. J'espère qu'il te sera utile pour prendre des décisions et te guider dans les prochains mois.



Bon réveillon, Flo.
Je ne te souhaite pas une bonne année 2023, on sait toi comme moi que cela ne veut rien dire depuis plusieurs années.
Mais je te souhaite de trouver ta voie et d'être heureuse, sincèrement.